24 Janvier 2012
Les journalistes qui ont couvert la dernière conférence de presse d'Etienne Tshisekedi ne s'attendaient qu'à des annonces. Des annonces, il y en a eu : l'annulation des élections législatives de novembre 2011, la mise en place imminente d'un gouvernement et la convocation d'un recensement général de la population en février 2012. Puis, l'inattendu de la part de Tshisekedi qui décide séance tenante d'embarquer à bord de sa Jeep Nissan blindée -celle qui avait été destinée pour sa campagne mais arrivée tard à Kinshasa- pour aller ce faire installer au Palais de la nation. Pour qui connaît la méthode Tshisekedi, il ne s'agissait pas d'une surprise mais de la fin pour laquelle il avait réuni même la presse, à savoir créer l'occasion de se lancer dans un frontal contre Joseph Kabila.
Tshisekedi sait que c'est là qu'il est le plus fort, dans la rue. La rue, une force et une faiblesse puisqu'elle ne suffit pas à elle seule. A Tunis, la rue n'a pas triomphé sans l'appui diplomatique des Occidentaux. Au Caire, il a fallu un coup d'Etat militaire contre Hosni Mubarak pour faire aboutir le mouvement de la place Tahrir. A Tripoli, l'Occident a dû intervenir avec frappes aériennes pour faire avancer les rebelles du CNT de Benghazi jusqu'à la Place verte, dans la capitale lybienne.
Pour peu que Tshisekedi se remémore ces dernières évolutions internationales, il comprendra que les annonces qu'il multiplie risquent à la longue, de connaître une certaine lassitude. Les annonces et même des actes qu'il se propose de poser tant que ceux-ci n'auront aucun effet sur la vie nationale. Que vaudra de mettre en place un gouvernement si celui-ci ne parvient pas à obtenir une reconnaissance internationale. Si cela avait réussi avec le fameux ' dédoublement des institutions en 1992, Tshisekedi n'a pas oublié que çà l'a été grâce à un appui déterminant de la communauté internationale résolument engagée dans la logique de la conférence nationale pro-démocratie. Encore qu'ici, le contexte a changé. C'était une transition hier. Et aujourd'hui, le cycle de l'alternance démocratique entamée avec les élections générales de 2006 commande de tenir compte de la contrainte de temps, de prendre en considération l'échéance 2016. Un an, deux ans d'un gouvernement «autoproclamé» sans effet, il y au ra à craindre que l'opinion commence à se cristalliser autour de la réappropration de la souveraineté populaire dans la perspective des élections générales à venir. A l'historique opposant d'en tirer les leçons s'il lui est possible de se faire modeste et surtout d'écouter les autres. Les autres parmi lesquels ses alliés de l'opposition en tête. Qu'est-ce qu'ils sont frustrés tous ceux opposants qui accompagnent Tshisekedi de l'unilatéralisme de leur leader. Le plus souvent -pour ne pas dire toujours -Tshisekedi décide seul, sans se concerter avec ses pairs, si bien que ses principaux alliés en sont à apprendre ses annonces par la voie des médias comme monsieur tout le monde. Cet unilatéralisme est plus néfaste dans la stratégie globale de l'opposition. Il joue, par exemple, à compromettre les chances quand l'Eglise catholique prend la voie d'aller revendiquer la vérité des urnes dans la rue à partir de février prochain alors qu'à la rue Pétunias une autre démarche se met en route sans aucune considération à une quelconque synergie.
H.M. MUKEBAYI NKOSO