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Le député Kiakwama Kia Kiziki : « Notre priorité c’est de construire l’Alternance politique »

 

Créé le 31 -01-2011 à 08 h00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN |  ACTUALITE | RDC | Mis à jour le LUNDI  31 -01-2011 à  08 h00 | PAR : LE POTENTIEL 

 



« Aujourd’hui, notre priorité est simple : construire l’Alternance politique. C’est-à-dire, une vision, un programme, un vrai programme, avec un homme pour les incarner et les porter devant les Congolais… ». Ce leitmotiv est du député national Gilbert Kiakwama Kia Kiziki de CDC, membre de l’Opposition. Interview

La constitution du 18 février n’a vécu que l’espace de quatre ans avant de céder la place à la nouvelle Constitution, celle du 20 janvier 2011. La révision constitutionnelle ayant été obtenue presque, en un tour de main, quel goût a-t-elle, en définitive, laissé au Député national que vous êtes ?

Les motivations de cette révision constitutionnelle et la manière cavalière dont elle a été menée me laissent un goût de cendre. Cette forfaiture remet en cause plus de 20 ans de lutte pour la démocratie. Le pays a certes changé de nom mais, pour dire vrai, les mœurs d’ancien régime sont encore tenaces. Ainsi, des parlementaires aux ordres sont capables de changer la constitution de notre pays en 5 jours (du 10 au 15 janvier).

Récapitulons : ils ont bafoué la parole donnée lors de la conférence des présidents de l’Assemblée nationale et la procédure quant au dépôt et aux signatures de soutien pour une proposition de loi de révision constitutionnelle. Ils ont jonglé avec les dates de transmission des documents, contraint le Sénat à ajouter un point à son ordre du jour, empêché un débat démocratique de fond à l’Assemblée nationale, confondu à dessein procédure d’urgence et procédure normale…

Quelle est la leçon de tout ceci ? Un groupe de Congolais, parce qu’il est majoritaire dans les chambres, s’octroie le droit de jouer quand il veut, et comme il veut, avec une constitution que 18 millions de Congolais ont adoptée par référendum. C’est un recul pour notre pays. Le principe démocratique impose à la majorité de ne pas mépriser la minorité. La loi du nombre seule ne suffit pas à garantir la stabilité d’un pays et surtout pas le consensus national. Les propagandistes du pouvoir se moquent de nous lorsque nous parlons de consensus national. Ils disent : «vous voyez, tout ce qu’ils veulent c’est un gouvernement d’union nationale». Ah ! les propagandistes ! Ils n’ont même pas remarqué qu’il y a plus de gens intelligents qui quittent leur coalition qu’il y en a qui y rentre. A part le CNDP, bien entendu.

Le consensus dont nous parlons n’est pas celui de 1+4, du partage équitable et équilibré du pouvoir. Le consensus dont nous parlons est celui du Contrat de confiance entre compatriotes, entre citoyens égaux. Il s’agit du Pacte républicain qui fait qu’une nation est une nation, Opposition et Majorité confondues. En se comportant comme il l’a fait, avec arrogance et mépris, le pouvoir AMP-PALU-UDEMO a brisé le Pacte républicain. Les Congolais ont été insultés, ils s’en souviendront.

Après avoir suivi attentivement le processus de révision de la constitution congolaise qui a conduit notamment au changement des règles de l’élection présidentielle ainsi que celles relatives aux équilibres institutionnels et le contexte dans lequel il a eu lieu, l’UE a noté que ce processus méritait un débat public plus large. Quelle lecture faites vous de cette déclaration ? Y trouvez-vous des sous-entendus susceptibles, selon vous, de contrarier le processus démocratique en RDC ?

Je ne vois pas en quoi la déclaration de Mme Ashton pourrait contrarier le processus démocratique congolais. Au contraire, pour qui connaît le langage policé des diplomates, cette déclaration est une condamnation du comportement anti-démocratique du pouvoir et de ses arguments mensongers. Par la voix de leur Haute Représentante, les 27 Etats membres de l UE disent très clairement deux choses. D’abord, l’UE affirme, comme nous, qu’une question d’une telle importance aurait mérité un débat plus large, c’est-à-dire une discussion plus longue, plus approfondie, impliquant les plus larges secteurs possibles de la nation congolaise. Ensuite, l’UE, comme nous, affirme que l’argument financier n’en est pas un. Prétendre que l’organisation du 2ème tour coûte la moitié du budget de 700 millions de tout le processus électoral est un mensonge éhonté et un aveu d’incompétence, il suffit de lire le budget prévisionnel de la CEI, et de consulter les experts ; le 2ème tour des présidentielles coûte 20 millions de dollars.

C’est ce qu’on appelle se faire déshabiller. La majorité devrait simplement avoir le courage d’assumer son ambition de garder le président sortant Joseph Kabila 50 ans au pouvoir, par tous les moyens, au prix de tous les renoncements, de toutes les compromissions, sans avancer le fallacieux prétexte du manque d’argent. Cette déclaration est cruelle pour le régime Kabila mais si interpellatrice pour notre peuple ! Car en définitive, quoi que dise l’Union européenne ou d’autres, ce sera à nous Congolais d’assurer le devenir de notre pays.

L’UE insiste « sur la responsabilité qui incombe aux autorités de la RDC d’assurer un processus électoral libre, régulier et pacifique, respectant les libertés d’expression, y inclus des médias ainsi que des conditions égales pour tous les candidats, qui leur permettront de faire campagne librement et en toute sécurité. Etes-vous de cet avis là ?

Bien évidemment, c’est cela le plus important. C’est un appel à la responsabilité, un rappel des responsabilités. En substance, tous les spectateurs de bonne foi de ce triste spectacle (Opposition politique, Société civile, Communauté internationale) disent la même chose à ce pouvoir : «Vous avez changé la constitution de manière discutable, pour obtenir un avantage politique à court terme. Soit. Dont acte. Mais maintenant, faites très attention à ce que le processus électoral, lui, ne soit pas discutable. « Et nous précisons ; il ne s’agira pas seulement de la lettre de la loi, mais aussi de son esprit.

Car, comment comprendre par exemple que moi, élu du peuple, je puisse me faire agresser lors de réunions politiques au Bas-Congo, deux fois en deux ans, sans que la police ne lève le petit doigt ? Comment comprendre que malgré ces agressions, la Police nationale congolaise refuse de pleinement régulariser la situation administrative des policiers que j’ai obtenus à grand-peine pour me protéger ? Comment comprendre que certains puissent librement manifester pour soutenir la révision de la constitution mais que les marches contre cette révision soient réprimées ? Comment comprendre que des étudiants manifestant à mains nues soient tués par balles ? Comment comprendre la privatisation de la RTNC par la coalition AMP-PALU-UDEMO ? Comment comprendre que seuls les militants ou sympathisants du PPRD et Alliés puissent se réunir, marcher même sur le boulevard du 3O juin sans entraves ? Comment expliquer que l’UNC de Vital Kamerhe voit ses meetings empêchés et ses membres arrêtés arbitrairement ? Comment concevoir que les membres de BDM de Ne Muanda Nsemi soient traqués, alors que ceux du CNDP circulent librement, et aux Kivus et dans la capitale ? Les mêmes envisagent maintenant de faire une loi électorale sur mesure alors qu’en 2006 nous avions voulu, pour la paix civile, une loi électorale la plus inclusive possible. Ces violations des droits et libertés, ce deux poids, deux mesures, ce mépris permanent, répondent à une politique du gouvernement contre les opposants au régime en place. Tout ceci illustre l’idée que le régime Kabila se fait de l’Etat républicain et de la démocratie. Nous avons le pouvoir, nous aimons le pouvoir, nous ferons tout pour garder le pouvoir.

Tout ceci justifie et rend légitimes les craintes et les rappels de l’UE. Car, sans garantie des droits des dissidents, le processus électoral sera vicié, et le pire pourra arriver : la contestation des résultats, la désobéissance civile, l’abstentionnisme, etc. La coalition AMP-PALU-UDEMO doit choisir le Congo qu’elle veut !

Après les entourloupettes faites à l’opposition dans le dossier relatif à la révision constitutionnelle, vous êtes finalement revenu sur terre. Maintenant que vous avez tourné cette page, quelle est votre « grande priorité » aujourd’hui ?

D’abord, je rectifie. Vous dites « vous êtes revenus sur terre » comme si nous nous étions bercés d’illusions. Non. Nous ne sommes pas des enfants. Nous savions que cette révision allait passer. Quand on sait les moyens qui ont été déployés, et les méthodes employées ! De nombreux parlementaires de la majorité eux-mêmes nous disaient leur désaccord et les menaces dont ils faisaient l’objet. Avez-vous remarqué que le franc congolais s’est fortement déprécié en janvier, malgré une injection de 25 millions de dollars dans le marché des changes par la Banque centrale, alors que les fondamentaux de l’économie, eux, n’ont pas bougé ?

Le but de notre bagarre au parlement était le suivant : lorsque demain on demandera à chacun de nous : «Qu’as-tu fait quand la dictature a commencé à s’installer au Congo ?» Nous pourrons répondre simplement, preuves à l’appui : « Nous avons dit non, à haute et intelligible voix, et nous nous sommes battus. »

Aujourd’hui notre plus grande priorité est simple : construire l’Alternance Politique. C’est-à-dire, une Vision, un Programme (un vrai programme, avec un diagnostic le plus fin possible, des réformes, et surtout des priorités), un homme pour les incarner et les porter devant les Congolais, et enfin une équipe pour les mettre en œuvre jour après jour.

L’Alternance, il faut la penser, la préparer, l’articuler, l’affiner, identifier les hommes, leurs convictions et leurs projets. Ensuite, choisir un Primus inter pares comme figure de proue. Dix ans de pouvoir pour Joseph Kabila c’est beaucoup ! Le président doit se reposer ! Comme il a acquis une expérience certaine dans la gestion des pays post-conflit, avec le système 1+4 et le rapprochement diplomatique avec le Rwanda, il serait judicieux qu’il mette cette inestimable expérience au service de l’Afrique et qu’il aide l’UA à régler les conflits persistant sur le continent ! J’ignore s’il sera candidat, puisqu’il parait que les grands panneaux qu’on voit dans la ville ne sont pas la campagne électorale mais, tous les Congolais seront fiers de le voir pacifier l’Afrique.

Avez mis le cap sur l’élection présidentielle ? Comment allez-vous vous y prendre ?


Absolument, nous visons les élections. La Convention des Démocrates Chrétiens (CDC ), parti au sein duquel je milite, estime que le président Kabila a échoué sur le plan politique et économique. De ce fait, comme aux élections provinciales, législatives et présidentielles de 2006, la Convention des démocrates chrétiens se prépare pour présenter sa vision de l’avenir aux Congolais et concourir aux futures élections à tous les niveaux.

Avec quels arguments ? Avec quel joker surtout que, dans l’opinion, on sait que vous n’avez pas plusieurs cordes à votre arc ? N allez-vous pas commettre l’erreur d’aller dans la bataille en ordre dispersé ?


D’abord, les arguments, ensuite les personnes. Les arguments : comme en 2006, notre futur programme tiendra compte des erreurs des régimes Mobutu et Kabila père & fils, et de nos convictions, afin de proposer des réformes essentielles dans les domaines politique, économique, financier, social et sportif. Avec pour objectif de favoriser la croissance, la création d’emploi et le développement humain. Par exemple à titre très personnel, je proposerai, entre autres, les mesures suivantes : annulation de la dernière révision constitutionnelle, décentralisation effective, donc indépendance des gouverneurs, élection des sénateurs au suffrage universel, effort constant dans la gouvernance publique, refonte de nos services de sécurité, construction d’une armée compétente, républicaine, équipée et bien ancrée au cœur de l’Afrique, promotion du sport-étude et des écoles de formations de jeunes, promotion de filières d’étude non universitaires et de la formation continue, promotion des droits de l’homme et des libertés individuelles, réforme du tissu économique et financier de notre pays en créant notamment des bourses mobilières, des banques agricoles et d’investissement, des mécanismes efficaces de contrôle des secteurs du bois, des mines, dont le diamant, de l’énergie (renouvelable et non renouvelable) et des télécommunications.

En fait, je rêve de sortir notre pays de sa torpeur. De cette médiocre culture politique, liberticide et castratrice, de cette culture économique rentière et de cueillette dans laquelle les gouvernants s’enferment depuis au moins la zaïrianisation. Ceux qui sont aujourd’hui au pouvoir n’ont rien entrepris. En fait ils n’ont rien appris ! Ils sont restés immobiles, sans réflexion, sans prospective économique…les changements de constitution ne développeront jamais la RDC. Il est temps de diriger véritablement la République démocratique du Congo, de la gouverner, simplement. On a fait beaucoup de révolutions-chaises musicales mais, quelles sont les réussites perceptibles par notre peuple et transmissibles aux générations futures ?

Vous voyez, ce ne sont pas les arguments qui manquent !


Maintenant les personnes : pour moi, un homme ne peut pas être à lui seul un programme politique. Je m’y refuse avec la dernière énergie. Le candidat putatif de l’Opposition ne pourra pas être à lui seul un programme. On gère un pays avec des hommes et une vision. Comme beaucoup, j’ai une certaine idée de ce que je crois bon pour mon pays et je suis prêt à en débattre avec tous les prétendants au fauteuil présidentiel. Peu importent les personnes. L’essentiel ce sont les idées : la fierté nationale, l’amour de notre patrie, l’ambition de son rayonnement national, africain et mondial. Pour ces objectifs je suis prêt à discuter avec tous les opposants. Comment y arriverons-nous ? Il n’y a pas de secret : respect mutuel, confiance, dialogue permanent. J’ajouterais, humilité, responsabilité et détermination. Ce sont nos seuls atouts. Nous n’avons pas d’argent ou de prébendes à distribuer.

Cette question est un test de maturité pour nous. Discutons franchement des idées et des ambitions de chacun. Mettons-nous d’accord sur un programme commun minimum. (Minimum parce que je sais qu’on découvrira des horreurs dans les placards de nos prédécesseurs ; il faudra ajuster les choses, une fois aux affaires). Mettons en place les mécanismes de surveillance du processus électoral, et je crois que le peuple congolais nous fera confiance.

Tout au long de cette législature finissante, vous n’avez pas, au niveau du Parlement, fait le poids face à la majorité présidentielle. Comment expliquer cela ?

Vous me donnez l’impression de ne pas avoir souvent suivi les débats à l’Assemblée nationale ou au Sénat. A chacun des débats des opposants comme Jacques Djoli, Lunda Bululu, Moise Nyarugabo, Balamage, Roger Lumbala, Francois Muamba, Delly Sessanga , Félix Vunduawe, Fidèle Babala, Clément Kanku, Lumeya, Nemoyato, Lombeya, Busa et bien d’autres encore… n’ont cessé d’interpeller le gouvernement, de stigmatiser son incurie, et son impéritie. Nous ne sommes pas des enfants. Nous savons que les tenants de la Majorité ne connaissent que le vote mécanique, nous n’avons jamais eu d’illusions sur l’issue des votes que nous demandions. Simplement dans notre combat d’opposant, nos interventions à la tribune du Parlement ont toujours obéi à des impératifs stratégiques. Quels sont-ils ? 1. Donner une occasion aux membres de la Majorité de se reprendre et de trouver enfin, peut-être, le courage de dire non. 2. Alerter l’opinion publique congolaise, et tous ceux qui s’intéressent au Congo. Leur montrer l’ampleur des mensonges et de la malveillance des tenants du pouvoir. 3. Prendre date. Une fois les dangers exposés lors du débat, il faut que chaque parlementaire se détermine publiquement. Demain lorsqu’un citoyen congolais se demandera si le politicien qui est devant lui veut vraiment le bien du pays, la réponse sera facile ; il n’aura qu’à regarder les listes de présence et de vote au Parlement.

Pour beaucoup, les conditions de vie de la population se sont aggravées. Pendant que la faim et la misère sont devenues le lot quotidien de la majeure partie de la population, le vol, la prédation, le détournement des deniers publics et la corruption se sont imposés dans le pays comme mode de gestion. Votre lecture de la situation générale du pays, plus particulièrement des 5 chantiers ?


Ces 5 chantiers ne sont pas un programme de gouvernement. Au mieux une aspiration de changement à apporter dans 5 secteurs importants. Encore fallait-il nous dire comment la coalition majoritaire allait y parvenir. L’absence de programme politique à l’entre deux tours des élections de 2006 a empêché ce régime de véritablement changer notre pays et sa gouvernance. Dès lors chaque acteur s’est dit : « pour le temps où je suis là, autant me mettre un maximum dans les poches » ? Je n’évoque même pas cette tolérance zéro où les principaux cadres et gestionnaires du pays peuvent tout se permettre en étant certains d’être confirmés à leur poste !

S’agissant des 5 chantiers nous entendons dire aujourd’hui : on a fait une partie, ça montre notre bonne foi, nous devons continuer. Steve Mbikayi, aujourd’hui dans l’opposition, l’a très bien dit. Si votre enfant obtient 30% à la fin de l’année, il a comme ils disent «fait quelque chose ». Cela ne veut pas dire qu’il a réussi.

Continuez-vous à percevoir l opposition politique comme une alternance politique crédible ?


J’allais dire que le fait d’être opposant n’était pas en soi une qualité. Mais à vrai dire, vu ce qu’il en coûte d’être opposant dans ce pays, je crois que ça dénote quand même un bon fond de bonne disposition.

Plus sérieusement, l’opposition en soi n’est pas une alternative crédible. Elle doit se constituer en alternative crédible. Elle en a les moyens. Elle est pleine d’hommes et de femmes de valeur, courageux. Elle en a l’opportunité, si elle est sincère et si elle se met résolument du côté peuple. Elle en a le devoir.

Le peuple congolais nous attend. Il doit regretter d’avoir massivement voté pour le changement en 2006 et de s’être retrouvé avec la fameuse coalition AMP-PALU-UDEMO indissoluble. Le peuple congolais en a assez d’être méprisé !

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