28 Décembre 2010
Créé le 28-12-2010 à 07 h00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN | ACTUALITE | RDC | Mis à jour le mardi 28 -12-2010 à 07 h40 | PAR : LE POTENTIEL
Hypothèque sur la tenue d’élections dans le délai constitutionnel, insécurité persistante dans l’Est, prédation des richesses, pressions d’ordre géostratégique, … les enjeux riment avec le danger. Il faut juguler la désagrégation en 2011.
La solution passe notamment par un recentrage de la diplomatie congolaise pour élargir le cercle des amis du pays. 2011 se pose ainsi comme l’année des choix stratégiques pour un nouveau départ de la République démocratique du Congo.
Très peu de Congolais ont tiré les leçons des guerres successives qui ont ensanglanté le pays depuis 1996. La crise de légitimité de janvier 1961 avait plongé le pays dans une situation inextricable. Les régimes successifs se sont imposés à la population. La recherche du bien-être collectif n’était plus qu’un alignement de bonnes intentions à travers des opérations de propagande érigées en vision politique et en modèle de gestion. Pendant cette période, les dirigeants étaient guidés par l’unique souci de satisfaire aux caprices du guide pour se maintenir au pouvoir et s’accrocher aux mamelles du Trésor public.
Cette perception a pris corps avant l’indépendance et survécu à la mise en place des institutions souveraines le 30 juin 1960. Chaque leader politique congolais disposait, des conseillers belges. Pendant la deuxième République, le système Mobutu a incarné au mieux des intérêts étrangers pour s’assurer une éternité au pouvoir.
Une culture de prédation est ainsi née, soutenue par des néocapitalistes véreux et déterminés à s’enrichir au détriment de l’intérêt du pays, et partant au grand dam des populations. Ce groupe d’individus, apparemment au service de ces forces néocapitalistes sauvages, s’est évertué à maintenir la majorité dans une pauvreté indescriptible. Le deal étant de servir les intérêts étrangers et en contrepartie, être rassurés de se maintenir au pouvoir.
C’est dans cette logique que, l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) a pris le bâton de la défunte deuxième République. Avec le concours des forces régulières des pays voisins, appuyées par des puissances planétaires, l’AFDL a eu raison du régime Mobutu. Fondamentalement, rien n’avait changé dans la conception du pouvoir d’Etat du côté congolais. Les tentatives de récupération de la pleine souveraineté par Laurent-Désiré Kabila se sont soldées par l’assassinat de ce dernier.
L’HEURE DES CHOIX
Aujourd’hui, avec un peu de recul, l’on aperçoit avec aisance le niveau de convoitise de la République démocratique du Congo. Tout le monde voudrait avoir accès à ses immenses ressources naturelles. A défaut de la voix pacifique, certaines puissances occidentales, s’appuyant sur des complicités aussi bien internes qu’externes, ont usé de la force pour avoir également droit au chapitre.
Aujourd’hui, il est établi que l’instabilité de la RDC, particulièrement dans sa partie Est, s’explique par la présence des minerais que l’on ne trouve nulle part ailleurs qu’en RDC. C’est le cas du très convoité Coltan, principale composante dans l’industrie des téléphones cellulaires.
Par ces richesses naturelles, la RDC s’est créée des ennemis – les mêmes qui l’empêchent, par diverses voies, d’accéder à une ère de paix pour sa reconstruction.
Que faire face en pareille circonstance ?
Dans différents cercles d’études, la solution penche en faveur du recentrage de la diplomatie congolaise. Il s’agit pour la RDC de faire usage de mêmes armes et tactiques auxquelles ont eu généralement recours ses principaux fossoyeurs.
De ce point de vue, il ne s’agit pas d’étendre la diplomatie congolaise par la multiplication des postes à travers le monde. Mais, la stratégie à mettre en œuvre est celle d’un large ratissage qui ne s’exerce non par la voie d’éternelles lamentations mais plutôt par un travail méthodique d’amélioration de l’image de marque du pays.
Par ses ressources naturelles, la RDC s’est fait trop d’ennemis. De la même façon, c’est par ses richesses ; celles par lesquelles tout le mal de la terre – massacres, viols massifs, pillages – lui est arrivé que la RDC se fera des amis.
Par contre, pour y arriver, il faudrait que le gouvernement, accompagné par l’élite intellectuelle du pays, fasse preuve de créativité en définissant les priorités et les orientations stratégiques sur lesquelles d’autres forces sociales viendraient se greffer.
Alors que se dessine dans l’avenir de grandes perspectives qui mettent la RDC au centre de grands enjeux dans une économie mondialisée, la démission de l’élite congolaise est flagrante au regard de son incapacité à tirer les leçons qui s’imposent pour faciliter la sortie du tunnel. Dans son ensemble, à savoir dirigeants politiques, chercheurs, chefs coutumiers, Société civile, elle reste préoccupée par la recherche éhontée d’un enrichissement rapide et facile, ignorant tout l’intérêt que le monde porte sur ce géant « amnésique » de l’Afrique centrale.
ELECTIONS INCERTAINES
Consacrée par la Constitution année du prochain scrutin présidentiel, 2011 annonce ses couleurs et approche à pas de géant. Toutefois, nul n’est en mesure de confirmer à ce jour la tenue d’élections apaisées dans le délai constitutionnel. La mise en place de la Commission nationale électorale indépendante (CENI) tarde à se concrétiser. La procédure est parsemée d’embûches. Le retard pris dans l’installation de la CENI fait peser une lourde hypothèque sur le déroulement de l’ensemble des scrutins dont le calendrier de la défunte CEI étale de 2011-2013. Encore latente, la crise pourrait éclater à tout moment. A moins d’un sursaut de patriotisme de la part de la classe politique.
En attendant, les tergiversations enregistrées actuellement font le lit d’une crise de légitimité évitable.
Quant au chapitre des droits de l’Homme, les défis sont nombreux. L’exclusion de la RDC des avantages liés à l’AGOA pour cause de violations massives des droits de l’Homme est révélatrice de l’étendue des efforts à fournir dans ce domaine. D’autant que cette décision a été prise par le président américain Barack Obama lui-même.
L’heure est venue de prendre date avec l’histoire pour enfin considérer, que plus jamais en RDC, les droits de l’Homme ne seront bafoués par les représentants de la puissance publique. Des procès comme celui qui est ouvert sur l’assassinat de Floribert Chebeya, secrétaire exécutif de la VSV (Voix des sans voix) sont des occasions propices à la crédibilisation de l’action des pouvoirs publics dans ce secteur.
N’empêche que le ministre de la Justice, Luzolo Bambi a fait un grave aveu d’impuissance : sur 128 injonctions faites au parquet, très peu ont abouti à un procès ! Le chef de l’Etat lors de son adresse au Parlement réuni en Congrès avait également fustigé la manière avec laquelle l’appareil judiciaire fonctionne. Preuve que la machine ne tourne pas rond dans ce secteur. Beaucoup restent à faire pour atteindre le niveau qui inspire respect et considération au plan national et international.
Cela dans la mesure où l’impunité et la corruption font bon ménage. L’une alimente l’autre et vice-versa. La consécration de cette boucle a été érigée en système gangrenant la gestion de la res publica. Or, l’histoire renseigne que les nations gangrenées par la corruption croupissent dans la criminalité et autres tares dont il est difficile de se relever.
Poussant leur insouciance jusqu’à des limites insoupçonnées, certaines élites ont pactisé avec les forces dites négatives opérant à l’Est. Dans un communiqué rendu public par le ministre des Mines, citant le chef de l’Etat, «les autorités locales, provinciales et nationales, tant civiles que militaires» sont impliquées dans l’exploitation, illégale des ressources naturelles.
Les ONG révèlent régulièrement des coalitions contre nature entre les officiers FARDC, les Mai-Mai et les FDLR dans l’exploitation des gisements miniers dans l’Est du pays. Pire, des chefs coutumiers sont accusés d’avoir offert, en contre partie des avantages matériels, des terres aux Mbororo, des nomades venus d’ailleurs. Ces éleveurs, qui sont à cheval entre les frontières soudano-congolaises sont réputés armés et se comportent en conquistadors.
SURSAUT COLLECTIF
2011 s’annonce comme une année de tous les enjeux mais aussi de tous les dangers. Ou ça passe ou ça casse. Dernière année de la législature en cours, elle doit susciter des comportements différents aussi bien de la part des dirigeants que de celle de l’ensemble des Congolais. Seuls des attitudes positives notables peuvent conduire à des changements attendus.
Au moment où le monde fait face à de grandes mutations dans les relations internationales, la RDC doit mettre à profit aussi bien sa position géostratégique que ses immenses ressources naturelles pour se faire une place au soleil. A cet effet, elle a besoin d’une diplomatie à la fois innovante et stratégique. La RDC se trouve devant un impératif ; se faire plus d’amis pour décourager ses ennemis. C’est sa seule issue de secours pour asseoir sur l’ensemble de son territoire une paix durable, gage de développement.
L’élite congolaise doit donc intérioriser cette réalité. Il y va de la survie du pays – peu importe la coloration politique des uns et les autres. Elle doit rompre le cordon ombilical qui la lie à des pratiques qui consacrent la soumission, l’égoïsme. Sa responsabilité consiste à briser le cycle infernal et le troquer contre ce que d’aucuns ont appelé la méritocratie, basée sur un travail productif et rémunérateur.
Un sursaut collectif s’impose. Dans le cas contraire, la RDC se plantera à la croisée des chemins. Alors qu’ailleurs, le monde bouge. Elle jouit, à cet effet, d’énormes avantages comparatifs, à savoir sa position géographique au cœur de l’Afrique et ses riches potentialités naturelles.