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Boris Toumanov

AFRIQUE REDACTION|Mis en ligne le 09/12/2009|09H15

Les tragédies se succèdent à un rythme soutenu ces dernières semaines. Les autorités sont mises en cause pour leur incapacité à stopper la série noire.

Correspondant à Moscou

La société et le pouvoir russes font de plus en plus penser ces derniers temps à un géant aveugle qui tourne en rond tout dans l’attente résignée d’une énième tuile qui va lui tomber sur la tête.

L’attentat meurtrier contre Nevsky Express les a visiblement plongés dans le désarroi, malgré les démarches et déclarations aussi énergiques que rituelles des autorités.

En effet, quel que soit le scénario réel de ce crime, il est clair que les sources du terrorisme échappent au contrôle de l’Etat. Si l’on adopte la thèse selon laquelle le Nevsky Express a été la cible d’un groupuscule de Tchétchènes insoumis et conduits par Dokou Oumarov, on peut se demander si les services de sécurité et l’administration contrôlent vraiment la situation au Caucase du Nord. Pour prévenir d’autres méfaits de ce genre, surtout s’ils se commettent à des milliers de kilomètres de cette région.

Cependant, la version impliquant la responsabilité des islamistes radicaux ne peut que souligner l’impuissance des autorités, qui se retrouvent soudain face à un mouvement de fanatiques suffisamment organisés pour faire sauter les trains sur tout le territoire russe.

Car, dans cette hypothèse, leur base idéologique et logistique ne se limiterait pas au Caucase du Nord mais s’étendrait jusqu’au cœur de la Russie et aux républiques musulmanes de Tatarstan et de Bachkortostan.

Il y a encore quelques jours, les officiels russes avaient tendance à présenter ce genre de considérations comme des commérages de la presse malintentionnée à la solde de l’opposition.

Or la tragédie à Perm où 112 personnes ont péri et quelques 140 personnes ont été blessées dans un incendie qui s’est déclaré vendredi dernier au night-club Cheval boiteux a donné une autre perception de cette chronique des morts non annoncées.

Les malheurs semblables deviennent en Russie trop fréquents, voire trop anodins pour qu’on puisse les présenter comme les conséquences fortuites de malchance exceptionnelle. Pour Gazeta.ru, influente édition Internet, "les deux "vendredis noirs" - celui de Nevsky Express et celui de Cheval boiteux - ont donné une horrible illustration de l’état général du pays dont l’infrastructure et l’administration sont totalement pourries".

"C’est la Russie qui a pris l’image du cheval boiteux, affirme l’éditorial de Gazeta.ru, car, à travers tout le pays, les baraques abritent non seulement des night-clubs, mais des écoles, des hôpitaux, des centres d’hébergement pour personnes âgées, des dortoirs et des auberges de travailleurs, sans parler des millions de locataires. Nous sommes un pays où des immeubles s’écroulent, des arsenaux explosent et des night-clubs s’enflamment sans qu’on prenne des mesures pour rompre cette tragique régularité. Ces catastrophes résultent directement du système de gouvernement. Entre temps, le pouvoir corrompu préfère faire commerce de ses prérogatives au lieu de faire son devoir".

"On peut discourir sans fin sur "la résurrection de la Grande Russie", conclut impitoyablement Gazeta.ru, "mais nous ne sommes en réalité qu’un pays du "tiers-monde".

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